jeudi 28 octobre 2010

Let's the Battle begin !


- Deren -

"Allons enfants de la Patrie,
Le jour de gloire est arrivé..."


Le jour de gloire... ou de boxon maximal.

Chacun de nous s'est réveillé ce matin avec une énorme boule à l'estomac.
Notre marge de manoeuvre est extrêmement réduite, nos chances de victoire dérisoires pour l'heure.

Nous avons discuté stratégie jusque tard dans la nuit, définissant nos rôles respectifs.
Edwin, naturellement, dirigera les troupes.
A ses côtés, Regdar jouera de sa hache à la tête de quelques hommes, assisté de Dinafaë.
Quant à moi...

... je dois juste faire basculer la bataille. Rien que ça. En réalité, si j'échoue mes petits camarades peuvent aussi bien rester chez eux jouer à la belote caldrazane car notre ennemi sera alors quasiment invulnérable.

Ma mission (et je n'ai pas d'autre choix que d'accepter) : détruire la Darkspear à l'aide d'une des baguettes mises au point par le Conclave grâce à notre tenebrum.
Et pour ajouter un tout petit détail, une broutille, une pécadille : alors que si j'échoue, nous sommes tous perdus, si je réussis en revanche... J'ai de bonnes chances d'y rester tout de même. De partir, un jour, et sans retour. Désintégré, vaporisé, annihilé, et autres joyeusetés.
Non, non, je n'ai pas de pression particulière, pourquoi ?

J'avais mis au point une manoeuvre d'infiltration en solo mais devant l'inquiétude d'Edwin, j'ai accepté de prendre avec moi quelques renforts : lui songeait à une mini-troupe de sept ou huit... Mais notre discrétion n'en serait que perturbée, aussi ai-je opté pour le compromis d'emmener un mage et une prêtresse d'Umbel avec moi : le premier pour me remplacer si les choses tournaient mal, le second pour nous guérir en cas de pépin...

Nous sommes désormais tous les trois, rendus invisibles (et également déguisés en drows pour leur part, au cas où...), à l'écart du champ de bataille et des deux armées qui se font face sous un ciel plus noir que par une nuit d'hiver pluvieuse à Dunkerque.
Même à des centaines de pas je peux lire la peur sur le visage des fantassins elfes et humains. Côté drow, je ne perçois que notre habituelle arrogance et une certaine jubilation. Nos ennemis sont sûrs d'eux, et ils ont de quoi...

Les deux masses humaines se mettent en branle l'une vers l'autre dans une clameur qui ferait presque trembler le sol. Les cors de guerre sonnent le début de ce qui sera un requiem pour des dizaines de milliers d'entre eux.

C'est le moment.

Mes acolytes et moi nous mettons silencieusement en marche (et même si nous ne sommes pas parfaitement silencieux, le vacarme alentour compense largement).

Edwin donne un signal aux mages de bataille afin qu'ils visent Scalandriax, le Dragon Noir, qui approchait. La plupart finit dissoute dans un flot d'acide que le Grand Ver crache. Les pertes sont importants mais la diversion est réussie : lorsque notre allié Dragon d'Argent s'élance à l'assaut, il prend complètement le dragon chromatique au dépourvu. Les deux commencent alors "leur" bataille.

Nous sommes désormais au coeur de la mêlée et autour de nous le combat fait rage. Traverser comme un spectre une telle scène de boucherie est pour le moins étrange, et plus d'une fois nous devons prendre garde à ne pas nous faire toucher par un vaste moulinet d'épée ou des flèches ratant leur cible.

J'entends les troupes de l'Alliance autour de moi crier de se concentrer vers un point des remparts pour réaliser une percée. Nous les suivons pour profiter de leur éventuel succès, tandis qu'au loin je vois Regdar et Dinafaë aux prises avec des troupes d'Elite drows. Je m'arrête quelques instants pour constater avec satisfaction que mes conseils à la prêtresse ont porté leurs fruits lorsque je la vois dominer mentalement un énorme barbare qui s'empresse d'enfoncer sa hache dans le corps d'un de ses supposés camarades. Regdar, quant à lui, trace un sillon sanglant dans les lignes ennemies.

Les troupes alliées ont réussi à créer la brèche souhaitée et nous nous y engouffrons, utilisant notre "détecteur" de Hosts pour éviter les mauvaises rencontres.

Nous parvenons bientôt à une immense place découverte et pratiquement déserte, seul espace nous séparant encore de la Darkspear. Etrange qu'un élément aussi stratégique ne soit pas surveillé... Dans un coin je finis par remarquer une silhouette familière : "l'ami" Bastirak a manifestement reçu l'ordre d'empêcher toute intrusion. Hélas pour lui, il ne peut pas voir l'invisible... Je me retiens d'aller lui planter mon épée Dhaerowbane dans le coeur pour me concentrer sur mon objectif, d'autant que l'absence de la soeur du mage à ses côtés n'est pas pour me rassurer.

Mes craintes ne tardent pas à se confirmer lorsque je le vois, après que nous avons parcouru quelques dizaines de mètres, commencer une incantation, ce que mon anneau de Magie de Bataille me confirme. Il m'aide d'ailleurs à identifier la Pluie de Météores qui s'apprête à s'abattre sur nous... Vas-y, petit magillon, balance la sauce, je te prépare une petite surprise...
Au moment où il relâche ses énergies magiques je les redirige magiquement vers lui, savourant par avance. Je suis donc extrêmement frustré lorsque je constate qu'il ne s'agit pas de Météores de Feu mais de Glace. Glace à laquelle il est immunisé de par son sang de Dragon d'Argent...
Néanmoins, les éclairs lumineux déclenchés par le sort me permettent de remarquer un détail jusque là passé inaperçu : non loin, dans un recoin sombre, je reconnais l'ancien ambassadeur de Jehannum accompagné de sa discrète mais mortelle (je peux en attester) escorte...
Une vraie réunion de mes ennemis préférés, et tout ça rien que pour moi, quelle chance !

J'intime au mage qui m'accompagne de s'occuper des assassins tandis que je décoche un carreau vers Bastirak, carreau que j'ai pris le soin d'empoisonner avec du venin de Scorpion Géant dont je lui réservais une dose depuis longtemps...
Las, il s'est également prémuni contre les projectiles et le mien ne fait pas exception, ricochant sur une paroi invisible pour finir sa course dans un mur de pierre.

Je fulmine de ces multiples contretemps et alors que je demande à mon prêtre de dissiper les sorts de protection de Bastirak, une petite voix se fait entendre dans ma tête : la voix de la raison, étrangement elle sonne comme celle d'Edwin... Ma mission. Je songe aux troupes dehors qui ne tiennent que dans l'espoir de la destruction de la Darkspear... mais combien de temps encore ?
Ma vengeance attendra donc encore un peu et alors que je m'apprêtais à lancer une Désintégration vers le mage-dragon, je crée instantanément une Porte Dimensionnelle et m'y engouffre, arrivant directement près de la tour, mon objectif.

Je sors ma baguette en songeant aux formules triomphantes qui pourraient être de circonstance (tout en espérant que la "porte de sortie" que je me suis prévue soit efficace) :
"Jeu, Set et match."
"Echec et Mat."
"Hasta la vista, baby".

J'active la baguette dont le rayon émeraude vient frapper la Darkspear. Alors qu'un flash d'un vert intense se diffuse sur tout le champ de bataille, je disparais. Mon sort de Prémonition a fonctionné !
Je reparais quelques centaines de pas plus loin.

La Darkspear est toujours debout.

Je lâche un juron interminable qui englobe les enchanteurs du Conclave, les drows, mon manque de chance et de jugeotte et la réforme des retraites.
Je regarde autour de moi et me rends compte que tout le monde a cessé de combattre pour observer la Tour, les uns avec espoir, les autres avec effroi. Je pourrai toujours mettre sur mon CV que j'ai su capter l'attention de plus de 100.000 personnes en un seul geste, la classe...
Toujours est-il que le sombre bâtiment est désormais parcouru d'une énorme brèche, telle une cicatrice malsaine exsudant une lumière verdâtre et pulsante.

De nombreux Drows se replient vers la Darkspear pour la protéger. Autant dire qu'y retourner est hors de question, surtout avec Bastirak qui doit me rechercher activement. J'ai une pensée fugitive pour le mage et la prêtresse qui m'accompagnaient mais je reviens vite vers des questions plus pragmatiques. Mon plan 'A' n'a pas fonctionné mais...
Je m'assieds quelques instants pour regarder des dizaines de mes congénères se replier, jusqu'à ce qu'enfin j'en voie un qui corresponde à mes attentes : un jeune lanceur de sort à la robe au motif de toile d'Araignée. Je sais n'avoir plus droit à l'erreur et je lance vers lui ma Volonté avec toute la force spirituelle dont je suis capable. La sienne semble se briser comme une fine couche de glace alors que je prends le contrôle de son esprit (sensation ô combien agréable pour ma part... Je réitèrerai, je crois).
Je lui tends la baguette en lui donnant mentalement mes instructions. Comme un pantin il rejoint ses camarades par la brèche et je le perds bientôt de vue, d'autant plus que je me mets à courir dans la direction opposée.
A distance respectable je m'arrête, et attends.

Une attente de quelques secondes sans doute mais qui semblent des siècles pour moi. Je peine à savoir ce qui se passe pour ma "poupée", par manque d'habitude. Et si cela aussi échouait ?

Soudain, une déflagration colossale. Comme un cercle d'énergie pure qui part de la Tour et se disperse au loin, balayant tout dans un rayon considérable autour de lui. Les murs les plus proches de la forteresse de Crom Kalamar, réputée inexpugnable, sont arrachés comme des brindilles, et moi-même qui suis pourtant à un stade de distance je finis projeté par l'onde de choc au sol.

Les ténèbres autour de la cité se dissipent presque instantanément alors que montent deux cris dans les cieux : le premier est la douleur et la détresse des elfes noirs; le second l'allégresse des habitants captifs de la capitale qui comprennent qu'ils sont désormais libres, libres de reprendre les armes pour lutter contre les envahisseurs. Les rayons du soleil qui ne tardent pas à poindre entre les nuages accentuent encore ces deux clameurs, alors que le corps sans vie de Scalandriax finit par tomber des cieux.

Je suis un putain de héros, qu'on se le dise.

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